

Pour l'Aïd, des habitants du sud du Liban prient sur les tombes de leurs proches
En ce jour d'Aïd el-Fitr, qui marque la fin du ramadan, les cimetières étaient bondés lundi à Aïtaroun, un village du sud du Liban où les fidèles sont venus prier sur les tombes de leurs proches tués pendant la guerre entre le Hezbollah et Israël.
Dans le village dévasté, où plus de cent habitants, dont des combattants du Hezbollah, ont été tués, les visiteurs se sont rassemblés dans un cimetière récemment installé, pour déposer des fleurs sur les tombes.
Sous les drapeaux du Hezbollah, des femmes en noir laissent éclater leur douleur en récitant la Fatiha, la première sourate du Coran. Parmi elles, Siham Ftouni, venue se recueillir sur la tombe de son fils, secouriste pour l'organisation de santé affiliée au mouvement islamiste.
"Nous avons défié le monde entier en étant ici, à Aïtaroun, pour célébrer l'Aïd avec nos martyrs. Leur sang nous a permis de revenir dans notre village", déclare-t-elle.
À proximité, une petite fille est assise près de la tombe d'une femme, dont elle tient la photo entourée de fleurs.
Des images de nourrissons et de jeunes hommes en uniforme militaire sont dressées au-dessus des tombes. Un chantre brise le silence avec des oraisons funèbres, arrachant des larmes aux fidèles.
Des visiteurs distribuent friandises et nourriture.
"Cette année, l'Aïd est différent. Aïtaroun, qui a perdu plus de 120 martyrs, dont de nombreuses femmes et enfants, vit un Aïd triste", témoigne Salim Sayyed, un agriculteur de 60 ans originaire du village.
"Mais la volonté de vivre restera plus forte que la mort", ajoute-t-il.
- Une "immense tristesse" -
Comme dans la plupart des villages du sud du Liban, frontalier d'Israël, seuls quelques habitants d'Aïtaroun sont rentrés et très peu de commerces ont rouvert.
Il leur a fallu attendre que l'armée israélienne se retire, plusieurs mois après le cessez-le-feu qui a mis fin le 27 novembre à un conflit de plus d'un an entre le Hezbollah et Israël.
Mais les deux parties s'accusent mutuellement de violer l'accord et Israël continue de mener des frappes au Liban, affirmant cibler des positions du Hezbollah. Très affaibli, le mouvement pro-iranien continue néanmoins de crier victoire.
Vendredi, pour la première fois en quatre mois de trêve, l'armée israélienne a bombardé la banlieue sud de Beyrouth après le tir de deux roquettes depuis le sud du Liban.
"Malgré les risques, la plupart des habitants sont venus passer le premier jour de l'Aïd aux côtés des martyrs de notre village", remarque Imad Hijazi, un chauffeur de taxi de 55 ans.
"La tristesse était immense, tout le monde était bouleversé par la perte de ses proches. J'ai perdu 23 membres de ma famille dans une frappe israélienne. J'avais honte de présenter mes vœux de l'Aïd à mes proches ou à mes amis", ajoute-t-il.
S.Schuster--MP