Début du procès à Washington d'un ancien Fugees emporté dans un vaste scandale politico-financier
Le musicien Pras Michel, qui a connu la gloire avec le groupe de hip hop The Fugees, est jugé à partir de lundi à Washington pour son rôle dans une campagne illégale d'influence menée par un financier malaisien au coeur d'un vaste scandale de corruption.
Son procès, qui pourrait voir défiler des témoins prestigieux comme l'acteur Leonardo DiCaprio, a débuté par la sélection des jurés et doit durer plusieurs semaines.
Le musicien américano-haïtien de 50 ans doit répondre de douze chefs d'inculpation liés à des contributions illégales à la campagne de réélection du président Barack Obama et à du lobbying illicite auprès de l'administration de son successeur Donald Trump. Il encourt 22 ans de prison.
Vingt-sept ans après la sortie de l'album "The Score", il doit s'expliquer sur les quelque 100 millions de dollars que lui a versés entre 2012 et 2017 le Malaisien Low Taek Jho, considéré comme le cerveau du scandale du fonds souverain malaisien 1MDB.
Selon l'acte d'accusation, Pras Michel a reversé une partie de cet argent pour des contributions à la campagne présidentielle de M. Obama en 2012, en cachant l'origine des fonds via des prête-noms et des sociétés off-shore.
Aux Etats-Unis, les dons en provenance de l'étranger sont interdits par les lois de financement des campagnes électorales.
"Le but de Michel et Low était de gagner un accès, et potentiellement de l'influence, auprès du candidat et de son gouvernement" qui ignoraient l'origine des fonds, selon l'acte d'accusation.
Selon le dossier judiciaire, Pras Michel s'était ensuite engagé à plaider auprès de l'administration de Donald Trump afin qu'elle "abandonne l'enquête sur le rôle de Low dans le détournement de milliards de dollars de 1MDB".
Ses efforts sont restés vains: M. Low, qui est en fuite, a été inculpé en 2018 pour corruption et blanchiment d'argent liés au pillage de ce fonds, censé contribuer au développement économique de la Malaisie.
M. Low et d'autres sont soupçonnés d'avoir utilisé cet argent pour acheter des résidences de luxes, des yachts, des oeuvres d'art et pour investir dans la production de films, dont "Le Loup de Wall Street" avec Leonardo DiCaprio. C'est pourquoi l'acteur figure sur la liste des témoins que l'accusation envisage d'appeler à la barre.
L'acte d'accusation porte aussi sur un nouvel accord passé en 2017: en échange de nouveaux versements, le musicien avait accepté de participer à des efforts clandestins de lobbying au profit de la Chine, où il s'était rendu avec des complices.
Le but était de convaincre les autorités américaines d'autoriser le rapatriement d'un dissident chinois installé aux Etats-Unis, le milliardaire Guo Wengui.
Leurs efforts ont de nouveau échoué, mais ce dernier, accusé d'avoir floué des milliers d'investisseurs pour s'enrichir, a été arrêté à New York il y a douze jours. S'appuyant sur ce rebondissement inattendu, Pras Michel a essayé de faire reporter son procès, là encore en vain.
G.Vogl--MP