

Première en italie: un journal publie une édition générée par l'IA
Première mondiale en Italie, où un journal publie depuis mardi une édition entièrement générée par l'IA durant un mois, une expérience destinée selon son directeur à "revitaliser le journalisme, pas à le tuer".
Il Foglio, un quotidien au ton irrévérencieux avec un tirage d'environ 29.000 exemplaires, affirme être le premier journal au monde à imprimer des éditions entières créées grâce à l'intelligence artificielle, une technologie émergente qui change rapidement la façon dont les rédactions fonctionnent.
Chaque édition version IA, composée de quatre pages, inclut environ 22 articles allant de la politique à la finance ainsi que trois éditoriaux.
Concrètement, la vingtaine de journalistes du quotidien demandent à une version du chatbot ChatGPT d'OpenAI de rédiger un article sur un sujet spécifique avec un ton particulier, et celui-ci produit un texte en utilisant des informations récoltées sur internet.
Parmi les articles signés IA cette semaine: une analyse des discours de la Première ministre Giorgia Meloni, un éditorial sur l'appel téléphonique entre Donald Trump et Vladimir Poutine, et un article sur la mode.
Claudio Cerasa, directeur de Il Foglio, a expliqué à l'AFP ce projet d'une durée d'un mois.
- Quel est le but de cette expérience?
D'une part, passer de la théorie à la pratique. D'autre part, c'est pour nous tester et donc comprendre quelles sont les limites de l'intelligence artificielle, mais aussi ses opportunités. Les frontières qui doivent être franchies et celles qui ne peuvent pas être franchies.
Tout cela peut naître dans un journal particulier comme le nôtre, car notre journal a une écriture irrévérencieuse, ironique, créative. Nous faisons des choses qui ne sont pas facilement reproductibles par une machine.
Notre volonté était d'afficher notre particularité et d'expérimenter quelque chose que personne au monde n'a expérimenté, en créant un débat, mais surtout en essayant de comprendre nous-mêmes comment l'intelligence artificielle peut être intégrée à l'intelligence naturelle.
- Comment cela fonctionne-t-il en pratique?
Lors de la réunion de rédaction, de nombreux thèmes émergent. Certains de ces thèmes sont ensuite traités non seulement par le journal normal, mais aussi par le journal artificiel.
Chaque question posée à l'intelligence artificielle contient une demande de sujet, une demande de ton, qu'il soit respectueux, irrévérencieux, scandaleux, provocateur, et donc nous lui demandons d'avoir le style du journal.
S'il y a trop d'erreurs, nous changeons d'article, s'il y en a peu, nous les laissons, car nous voulons montrer quelles sont les limites. Cela ne sert pas à montrer à quel point c'est beau.
- Quelles premières leçons avez-vous pu tirer de cette expérience?
L'intelligence artificielle dépasse toutes les attentes. Nous avons appris qu'elle peut faire des choses qui peuvent concurrencer ce que produit un être humain.
L'innovation doit être acceptée, car elle ne peut être arrêtée. Elle doit être comprise, elle doit être maîtrisée et transformée en une opportunité de croissance, car s'il existe un jour une demande d'articles uniquement écrits par l'intelligence artificielle, il faut l'accepter, mais cette demande devra accroître la créativité des journalistes, car les journalistes devront commencer à s'habituer à ne jamais faire ce qu'une machine pourrait faire.
Donc c'est un moyen de revitaliser le journalisme, pas de le tuer.
- Les journalistes de votre rédaction sont-ils inquiets?
Non, tout le monde se divertit, tout le monde est curieux. Et d'ailleurs il est intéressant de noter que grâce à cette expérience nous atteignons un public bien large.
Il y a beaucoup de personnes qui, grâce à l'intelligence artificielle, découvrent le journal traditionnel. Le premier jour, nous avons eu une augmentation de 60 % des ventes.
Ce n'est pas un hasard si aucun grand journal n'y a pensé, car cela fait évidemment peur. Seul un journal comme le nôtre, qui est un peu un cas unique, peut se permettre de faire une telle expérience.
- Avez-vous mis côte à côte un article écrit par un journaliste et un autre écrit par l'IA pour voir la différence?
Nous l'avons fait, et bien sûr les articles écrits par les êtres humains sont meilleurs, car ils ont toujours quelque chose en plus, ils ont toujours un élément de créativité, de connexion, de lien imprévisible que l'intelligence artificielle n'a pas.
- Comment réagissent vos lecteurs?
90% des lecteurs sont amusés, 10% s'inquiètent et disent "N'abandonnez jamais votre intelligence naturelle parce que vous êtes meilleurs". Mais personne ne dit que l'opération est stupide et n'a pas de sens.
Tout le monde comprend l'esprit de cette initiative.
J.Becker--MP