Accord UE-Mercosur: sommet clé avec von der Leyen à Montevideo
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé jeudi sa participation à Montevideo à un sommet des pays du Mercosur, avec lesquels l'UE tente de finaliser un accord de libre-échange.
"Atterrissage en Amérique latine. La ligne d'arrivée de l'accord UE-Mercosur est en vue. Travaillons ensemble, franchissons-la", a-t-elle écrit sur le réseau social X.
Le projet de traité, discuté depuis 1999, vise à supprimer la majorité des droits de douane entre l'Union européenne et le Mercosur afin de créer un vaste marché de plus de 700 millions de consommateurs.
Il s'agirait du "plus grand partenariat commercial et d’investissement jamais vu. Les deux régions en tireront profit", a affirmé Mme von der Leyen, qui a atterri à Sao Paulo, en transit vers Montevideo.
Un accord politique avait été conclu en juin 2019, mais jamais ratifié en raison des réticences de plusieurs pays, dont la France. Les détails n'ont jamais été dévoilés.
Une large majorité des Etats membres de l'UE, Allemagne et Espagne en tête, font désormais pression pour conclure la négociation au plus vite.
L'accord permettrait à l'UE, déjà premier partenaire commercial du Mercosur, d'exporter plus facilement ses voitures, machines et produits pharmaceutiques.
De l'autre côté, il permettrait aux pays sud-américains concernés d'écouler vers l'Europe de la viande, du sucre, du riz, du miel, du soja...
En Europe, les partisans de l'accord soulignent le besoin de débouchés pour les exportateurs et la nécessité de ne pas laisser le champ libre à la Chine, rival avec qui les relations commerciales se sont considérablement tendues.
Une nécessité d'autant plus pressante avec le retour à la Maison-Blanche de Donald Trump, qui menace d'imposer des droits de douanes sur des produits européens.
Mais de nombreuses ONG et militants de gauche estiment que la création de cette vaste zone de libre-échange accélérerait la déforestation en Amazonie et aggraverait la crise climatique en augmentant les émissions de gaz à effet de serre. Greenpeace dénonce un texte "désastreux" pour l'environnement, sacrifié pour privilégier "les profits des entreprises".
- "C'est la Commission qui décide" -
Le président français Emmanuel Macron estime que l'accord n'est pas acceptable "en l'état". Outre le respect des Accords de Paris sur le climat, il réclame la protection des agriculteurs européens, déjà en difficulté et qui ont été nombreux à manifester ces derniers mois.
Le Premier ministre polonais Donald Tusk lui a emboîté le pas fin novembre, affirmant qu'il n'accepterait pas le projet "sous cette forme".
Paris pourra-t-il réunir suffisamment d'alliés pour freiner une nouvelle fois l'accord UE-Mercosur au moment où la France semble affaiblie politiquement avec la chute du gouvernement de Michel Barnier et l'absence de majorité claire au Parlement ?
"Si les Français ne veulent pas de cet accord... ils ne décident plus de rien, c'est la Commission européenne qui décide", avait affirmé fin novembre le président brésilien Luiz inacio Lula da Silva, fervent défenseur de l'accord, également attendu pour le sommet du Mercosur à Montevideo jeudi et vendredi.
En vertu des traités européens, la Commission est seule négociatrice des accords commerciaux au nom des Vingt-Sept. Mais une fois un éventuel texte signé avec les pays du Mercosur, elle devra obtenir sa ratification en gagnant l'approbation d'au moins 15 Etats membres représentant 65% de la population de l'UE, puis en réunissant une majorité au Parlement européen.
C'est loin d'être acquis. L'Italie pourrait rejoindre le front du refus, tout comme l'Autriche ou les Pays-Bas qui ont déjà exprimé leurs réticences. Le ministre italien de l'Agriculture Francesco Lollobrigida a rejeté le projet mi-novembre, en exigeant que les agriculteurs sud-américains soient soumis aux mêmes "obligations" que ceux de l'UE.
"Le texte n'est toujours pas satisfaisant", a déclaré cette semaine à l'AFP une source gouvernementale italienne.
Pour empêcher l'adoption du texte, la France a besoin de rallier trois autres pays représentant plus de 35% de la population de l'UE, un seuil qui serait aisément franchi avec l'appui de Rome et Varsovie.
H.Klein--MP