Les Ghanéens comptent les votes pour une présidentielle disputée
Les Ghanéens ont commencé samedi soir à dépouiller les bulletins de vote après des élections législatives et une présidentielle disputée entre le vice-président et ancien banquier central Mahamudu Bawumia et l'ex-président issu de l'opposition John Mahama.
Au moins deux personnes ont été tuées par balle dans deux incidents distincts en marge du scrutin, selon la police.
Premier producteur d'or d'Afrique et deuxième producteur de cacao mondial, le Ghana est confronté à une inflation et un endettement élevés, et a dû recourir à un prêt de trois milliards de dollars du Fonds monétaire international (FMI).
Dans ce pays considéré comme un modèle de stabilité dans une région secouée par de récents coups d'Etat, les électeurs devaient désigner un successeur au président Nana Akufo-Addo, qui se retire après les deux mandats autorisés par la loi, et élire leur nouveau parlement.
"Nous voulons voter pour le changement, car la situation économique est très difficile", a déclaré à l'AFP James Nsiah, policier à la retraite, en attendant de déposer son bulletin dans le quartier de Jamestown à Accra.
Une personne a été tuée par balle dans un bureau de vote et une autre blessée à Nyankpala dans le nord et une autre personne a été abattue à Awutu Senya Est dans le centre du pays, a indiqué la police.
Les deux principaux partis, le Nouveau parti patriotique (NPP) et le Congrès national démocratique (NDC), ont alterné au pouvoir de manière presque égale depuis 1992.
Avec son slogan de campagne "Break the 8" ("Briser le 8", en référence à la limite de deux mandats de quatre ans du président sortant), le candidat du NPP Mahamudu Bawumia espère offrir à son parti un troisième mandat consécutif au pouvoir, ce qui serait sans précédent.
Cet ancien vice-gouverneur de la Banque centrale a tenté de se distancier des critiques concernant la gestion de l'économie par Nana Akufo-Addo, bien qu'il ait été le chef de son équipe de gestion économique.
Vêtu d'une tunique blanche traditionnelle, il a voté de bonne heure samedi dans son fief de Walewale, dans le nord du pays.
"J'ai bon espoir de gagner cette élection", a-t-il déclaré aux journalistes présents.
- "Très serré" -
Ces derniers mois, l'inflation est passée de 54% à environ 23%, et d'autres indicateurs économiques se sont stabilisés. Mais de nombreux Ghanéens restent préoccupés par le coût de la vie et le chômage.
Les inquiétudes concernant l'économie pourraient faire pencher la balance en faveur de l'opposant John Mahama, déjà président de 2012 à 2017 et candidat pour la troisième fois à la présidentielle.
Certains analystes estiment qu'il pourrait tirer avantage du désarroi des électeurs face aux résultats économiques du NPP, mais l'ancien président est également critiqué par ceux qui se souviennent des coupures d'électricité massives pendant son mandat.
"Cette fois-ci, tout le monde peut savoir dans quelle direction aller en raison des résultats catastrophiques du gouvernement Akufo-Addo-Bawumia", a déclaré M. Mahama en votant dans sa ville natale de Bole, dans le nord.
Les deux principaux candidats sont originaires du nord du Ghana, traditionnellement bastion du NDC mais aujourd'hui plus fragmenté, ce qui en fait une région clé du vote.
Abdullah Mohammed, 19 ans, a voté pour la première fois dans le quartier de Nima, à Accra. Il concède avoir bénéficié de la politique de gratuité de l'éducation menée par Nana Akufo-Addo, mais il attend "un président qui amène des changements".
Esther Adobea, vendeuse de chaussures à Accra, est préoccupée par la situation économique, mais se dit prête à donner à M. Bawumia une chance d'améliorer les choses. "Je vois qu'il peut gérer le pays pour nous. Notre économie n'est pas bonne, mais il peut faire mieux".
Outre le coût de la vie, les dommages économiques et écologiques causés par l'exploitation illégale de l'or sont devenus un enjeu électoral majeur. Le gouvernement du président sortant avait promis d'éradiquer ce problème, mais il s'est accru avec la hausse des prix de l'or.
Le Ghana reste par ailleurs, tout comme ses voisins frontaliers, le Bénin, le Togo et la Côte d'Ivoire, confronté à des risques croissants de débordements violents dus aux conflits jihadistes au nord du pays, au Burkina Faso et au Niger.
J.Becker--MP