Münchener Post - A Sofia, l'agonie de la montagne Vitosha, berceau du skieur Popov

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A Sofia, l'agonie de la montagne Vitosha, berceau du skieur Popov
A Sofia, l'agonie de la montagne Vitosha, berceau du skieur Popov / Photo: Nikolay DOYCHINOV - AFP

A Sofia, l'agonie de la montagne Vitosha, berceau du skieur Popov

Sur les murs d'un refuge de la montagne Vitosha surplombant Sofia, s'affichent les dossards d'Abi, surnom affectueux donné au meilleur skieur de Bulgarie, Albert Popov.

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C'est là qu'enfant, il a chaussé les spatules. Mais aujourd'hui, impossible de former de futures stars, déplore Ivaylo Rangelov, fondateur il y a 25 ans du club qui a vu naître Popov et d'autres champions de la glisse.

Devenu l'un des défenseurs les plus virulents du massif, il montre avec colère poteaux rouillés et câbles métalliques en déliquescence, vestiges d'une infrastructure autrefois florissante.

"Ici se trouvait le premier télésiège de Bulgarie", raconte cet ex-commando des forces spéciales, âgé de 57 ans. "Mon père y a appris à skier, puis ce fut mon tour et après moi, trois générations d'enfants de Sofia, parmi lesquels Abi".

A la fin des années 1980, Sofia-Vitosha avait posé sa candidature à l'organisation des Jeux olympiques d'hiver de 1992, finalement attribués à la ville française d'Albertville.

À l'époque, la montagne comptait plus d'une douzaine de télécabines et remontées mécaniques.

Après la chute du communisme en 1989, ces infrastructures ont été progressivement privatisées et, au fil des ans, elles ont cessé de fonctionner les unes après les autres, alors que prospérait dans le même temps la populaire station de Bansko (sud-ouest).

- Un seul télésiège -

Située à faible altitude, la station est aussi touchée par la coûteuse fabrication de neige artificielle sur fond de réchauffement climatique.

Désormais, dans le pays le plus pauvre de l'UE, les habitants de Sofia n'ont accès qu'à un seul télésiège divisé en deux sections, pour une seule piste.

En ce jour de grand soleil, une centaine de petits s'initient au chasse-neige loin de l'air pollué de la capitale bulgare en contrebas.

"Vitosha, c'est le terrain de sport des habitants de Sofia", commente M. Rangelov. Mais "une fois que les enfants ont appris à tenir sur des skis et à faire leurs premiers virages, ils n'ont plus d'endroit pour progresser", constate-t-il, amer.

La silhouette de la montagne est omniprésente dans cette ville de 1,2 million d'habitants, d'où l'on aperçoit ses pentes boisées et son sommet, Cherni Vrah, à 2.290 mètres, le "Mont Noir" ainsi nommé en raison des tempêtes qui le balayent fréquemment.

C'est aussi le plus ancien parc naturel des Balkans, avec ses 200 espèces d'oiseaux et ses cerfs, chevreuils, ours et loups peuplant les forêts.

Albert Popov, entré à 27 ans dans l'histoire du ski bulgare en remportant le slalom de Madonna di Campiglio (Italie) début janvier, regrette lui aussi le déclin du domaine skiable.

"Athlètes, enfants, passionnés, jeunes, vieux, nous méritons que cette précieuse montagne nous soit rendue dans toute sa splendeur", disait-il en 2023 dans la presse bulgare. Il n'a pas donné suite à la demande d'interview de l'AFP, tout comme la compagnie gestionnaire.

- Difficile "renaissance" -

Si le refuge résiste, la plupart des chalets et autres logements ont été transformés en luxueuses résidences privées appartenant à des oligarques.

Et depuis la fermeture en mai 2024 de la télécabine qui menait de Sofia au coeur de la zone skiable, l'accès n'est plus possible qu'en voiture et en bus - ou à pied pour les plus courageux (trois heures de marche).

Faute de places de parking suffisantes, des dizaines de véhicules sont garés le long de la route et les autocars se bousculent.

Parmi les passagers, un couple de retraités venus du sud de la France. Ils ont choisi de se rendre à Vitosha "pour partager les habitudes des Sofiotes", expliquent les sexagénaires François et Isabelle Trebosc. "Vitosha est un peu ce que la mer est aux Marseillais".

Encore faut-il "rendre la montagne aux habitants", promesse du maire Vassil Terziev, qui veut redémarrer les remontées mécaniques.

Après la victoire en début d'année d'Albert Popov, l'élu a confié sur Facebook son "angoisse" à l'idée des occasions perdues pour former de futurs champions à Vitosha.

"La tâche est difficile", a-t-il reconnu, appelant l'ensemble des acteurs à "se retrousser les manches pour permettre une renaissance".

P.Mueller--MP