Deuxième essai pour le vol inaugural de Starship, la plus grande fusée du monde
Décollage d'une géante, deuxième tentative: SpaceX doit réessayer jeudi de lancer pour la première fois dans l'espace sa nouvelle fusée Starship, la plus grande du monde, destinée à des voyages vers la Lune et Mars.
La fenêtre de tir s'ouvrira à 08H28 locales (13H28 GMT), jusqu'à 09H30. Le théâtre de ce spectacle très attendu est la base spatiale Starbase de SpaceX, située à l'extrême sud du Texas, aux Etats-Unis.
Lundi, une première tentative de lancement avait été annulée dans les dernières minutes du compte à rebours, à cause d'un problème technique.
"Il s'agit du premier vol d'une fusée immense, très complexe", avait déclaré dimanche le patron de SpaceX, Elon Musk, en qualifiant ce test de "très risqué".
Du haut de ses 120 mètres, Starship est à la fois plus grande que la nouvelle méga-fusée de la Nasa, SLS (98 m), qui s'est envolée pour la première fois en novembre, et que la légendaire Saturn V, la fusée du programme lunaire Apollo (111 m).
La poussée au décollage de Starship doit aussi être environ deux fois plus puissante que ces deux lanceurs - ce qui en fera la plus puissante du monde.
Ce mastodonte noir et argenté n'a encore jamais volé dans sa configuration complète, avec son premier étage surpuissant, appelé Super Heavy et équipé de pas moins de 33 moteurs.
Seul le deuxième étage du véhicule, le vaisseau Starship qui donne par extension son nom à la fusée entière, a effectué des tests suborbitaux (à environ 10 km d'altitude).
C'est lui qui a été choisi par la Nasa pour devenir, dans une version modifiée, l'alunisseur de la mission Artémis 3, qui doit ramener des astronautes sur la surface lunaire pour la première fois en plus d'un demi-siècle, officiellement en 2025.
- Crainte d'explosion -
Jeudi, le plan de vol est le suivant: environ trois minutes après le décollage, Super Heavy doit se détacher et retomber dans les eaux du golfe du Mexique.
Le vaisseau Starship doit alors allumer ses six moteurs et continuer seul son ascension, jusqu'à plus de 150 km d'altitude. Après avoir effectué un peu moins d'un tour de Terre durant environ une heure, il doit retomber dans l'océan Pacifique.
Mais franchir toutes ces étapes dès le premier vol d'essai serait un exploit. Le but est surtout de récolter un maximum de données pour améliorer les prototypes suivants.
Elon Musk a tenu à tempérer les attentes, en déclarant qu'atteindre l'orbite du premier coup était peu probable.
Il s'est contenté d'espérer que le pas de tir ne soit pas détruit par l'explosion des moteurs de Super Heavy au moment de l'allumage.
"Mon plus grand souhait est que, pitié (...) on soit loin du pas de tir avant que quelque chose tourne mal", a-t-il dit. Si celui-ci "fond", le reconstruire pourrait prendre "des mois", a-t-il ajouté.
- Casser les prix -
La fusée a déjà des clients: le premier vol avec équipage de Starship doit être effectué avec le milliardaire américain Jared Isaacman.
Un autre milliardaire, le Japonais Yusaku Maezawa, et l'Américain Dennis Tito (le premier touriste spatial de l'histoire), ont également annoncé qu'ils monteraient à bord pour un voyage autour de la Lune.
Starship doit pouvoir emporter jusqu'à 150 tonnes de chargement en orbite. Pour comparaison, la fusée Falcon 9, que SpaceX lance à une cadence effrénée, ne peut elle emporter qu'un peu plus de 22 tonnes en orbite terrestre basse.
Mais la véritable innovation de Starship est qu'elle doit être entièrement réutilisable - ce qu'Elon Musk pense réalisable d'ici "deux ou trois ans".
Pour ce premier test, il ne sera tenté de récupérer aucun des deux étages de la fusée. Mais à terme, Super Heavy devra revenir se poser contre sa tour de lancement, équipée de deux bras pour l'immobiliser.
Le vaisseau Starship devra, lui, revenir se poser sur Terre à l'aide de rétrofusées. C'est cette manoeuvre qui avait été plusieurs fois tentée en 2020 et 2021. Après plusieurs explosions au moment de toucher terre, un prototype avait finalement réussi son atterrissage.
"Nous avons conçu Starship pour se rapprocher le plus possible des opérations de compagnies aériennes", avait expliqué en février Gwynne Shotwell, la numéro 2 de SpaceX.
L'idée d'un lanceur réutilisable, la grande stratégie d'Elon Musk, est de casser les prix. Chaque vol de Starship pourrait à terme ne coûter que "quelques millions" de dollars, affirme-t-il.
Un impératif pour le milliardaire, qui estime que les humains auront besoin de centaines de fusées Starship pour avoir une chance de devenir une espèce multi-planétaire. Son but ultime est l'établissement d'une colonie autonome sur Mars.
A.Roth--MP